Il y a exactement 2 ans, en Iran, le 16 septembre 2022, Mahsa Amini succombait aux coups de la police des mœurs.

 

A cette occasion, nous partageons la chronique France Inter de la journaliste Anne Rosencher, directrice déléguée de la rédaction de L’Express, avec son autorisation.

 

« C’est têtue une mèche de cheveux, ça ondule, ça s’emmêle, ça vole au vent et quand ça s’évade du tissu qui l’enserre, c’est dangereux une mèche de cheveux.

Pour avoir laissé s’échapper trois ou quatre boucles brunes du voile imposé par le régime des mollahs, la jeune kurde iranienne Mahsa Amini a été arrêtée par la police des moeurs le 16 septembre 2022, puis tabasser jusqu’à ce que mort s’en suive.
La mort pour une mèche de cheveux, ce fut le feu aux poudres, le soulèvement, les chants, les feux de joie. Et ces cheveux, tous ces cheveux dévoilés.
C’était trop dangereux pour la république islamique d’Iran. Alors, ce fut vite la répression que l’on sait, des manifestants tués, des incarcérations, des femmes violées, torturées, des hommes exécutés. Un soulèvement écrasé en massacrant une jeunesse.
Malgré cela, malgré deux ans d’une répression terrifiante, des images continuent de nous parvenir. Encore des femmes et des hommes qui tiennent tête, et ces cheveux, toujours comme une aspiration, comme dans le poème de Rimbaud, quand il dit, « je laisserai le vent baigner ma tête nue ».

Depuis deux ans, des femmes de la diaspora iranienne me disent leur admiration sans bornes pour cette jeunesse, pour son courage. Les générations précédentes avaient créé des bulles de vie libre dans la sphère close des appartements. A l’abri des murs, certains dansaient, buvaient, s’embrassaient déjà. Mais leurs petites sœurs et leurs petits frères ont voulu faire tomber ces murs.
C’est si mystérieux le courage à ce niveau-là. D’où vient-il ? Qu’est-ce qui fait que certains sont prêts à payer un prix fou pour une idée, un principe, une aspiration, un droit.
Nous regardons d’ici ce courage-là, et nous ne pouvons pas faire grand-chose si ce n’est en parler, en parler plus.

Tout comme il faudrait parler plus du sort des femmes afghanes.
« Plus réprimées que jamais depuis le 22 août »

Elles n’avaient déjà plus le droit d’étudier, plus le droit de travailler, plus le droit de sortir sans tuteur, désormais les talibans leur interdisent de faire entendre le son de leur voix dans l’espace public. Le son de leur voix… c’est inouï.

Mais sur ce sujet, comme sur la révolte des femmes iraniennes depuis deux ans, il faut bien dire qu’une certaine discrétion règne dans les rangs d’un militantisme féministe. Par relativisme culturel, par peur de passer pour islamophobes, de passer pour « anti-voile » m’a-t-on dit au sujet des iraniennes. Par peur de passer pour réac et que sais-je encore, tournez-le comme vous voulez. Cette gêne aux entournures, ces pudeurs sur les combats si évident, est incompréhensible.
Ici ou ailleurs, il n’y a pas différentes définitions de l’égalité des droits, le cri « Femme, Vie, Liberté » est universel. »

 

Chaque jeudi sur France Inter, le regard d’Anne Rosencher.

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