Christian Hahn fête la 500e de GsunTheim : son émission hebdomadaire en alsacien sur France 3 Alsace, autour de l’humour et de la culture, dans la plus pure tradition du cabaret alsacien. Ci-contre entre Robin Leon et Hervé Aeschbacher, réunis pour l’occasion.
Depuis 16 années, Christian Hahn reçoit des invités étonnants ou prestigieux, connus ou moins connus, tous profondément alsaciens, et fait des records d’audience.

 

  1. Comment a commencé l’aventure de GsunTheim ?

La direction [de France 3 Alsace] de l’époque m’a demandé de réfléchir à un nouveau concept en alsacien, en extérieur et avec des moyens allégés, réduits à moins d’une dizaine de techniciens, auxquels j’ai rajouté un chroniqueur et trois comédiens.es. J’ai donc imaginé un talk-show avec un invité unique en alsacien et un invité en français qui évoque le lieu qui nous accueille. Voilà pour le talk. Pour le show, j’ai repris la séquence “leçon d’alsacien“ avec Melle Mamsell, que nous avions déjà mis à l’antenne depuis la saison 1999/2000, et deux sketchs appelés “Blanche et Schwartz“ avec Nadine Zadi et Jean-Philippe Pierre, et un sketch Schleumayer, que j’interprète avec Cathy Bernecker. Enfin, Hervé Aeschbacher intervenait en ouverture d’émission puis en cours, pour une chronique qui a changé au fil des ans, et en fin d’émission pour la présentation du lieu. De cette manière, je réunissais les exigences de la commande avec mon souhait de faire un entretien en profondeur avec un invité dans les domaines les plus divers. Sur 26’ d’émission, le talk dure environ 19’ ce qui est très rare sur une antenne régionale.

 

  1. La télévision a évolué depuis le lancement de GsunTheim, votre émission dominicale a-t-elle été remise en question ?

L’émission s’est régulièrement adaptée. Certaines rubriques ou séquences ont été supprimées ou changées. J’avais une séquence Hergloffeni, mot alsacien qui désigne les personnes venues d’ailleurs pour s’installer en Alsace et qui signifie littéralement, “ceux venus à pieds“… Cette rubrique permettait d’interroger en une minute trente, de nouveaux résidents venus d’horizons très divers, sur leur ressenti de l’Alsace et des alsaciens. On y a vu défiler beaucoup d’étudiants originaires du monde entier, des fonctionnaires européens dans les différentes institutions et des chercheurs étrangers installés à Strasbourg ou dans la région de Saint Louis, au campus Novartis. Je l’ai arrêté après trois ans. J’avais aussi une séquence question piège, posée par un.e des comédiens.nes, qui était à la fois une question impertinente et parfois loufoque. Sur les trois questions, l’invité disposait d’un joker, à savoir un objet personnel qu’il pouvait alors raconter.

Il y a eux aussi des séquences gags sur certains enregistrements, notamment pour la 100e, la 200e et la 300e.

Mais, jusqu’au confinement, les fondamentaux sont restés. Le vrai changement a eu lieu à partir de 2020.

 

  1. Votre émission fait des records d’audience, existe-t-il des équivalents sur les antennes de France 3 dans d’autres régions ?

En règle générale, les émissions en langues régionales font de très bonnes audiences pour plusieurs raisons. Je crois que les régions à fortes identités restent globalement attachées à leurs langues régionales, d’autant que toutes les émissions sont sous-titrées en français pour inclure le mieux possible les non- locuteurs et aidés chez nous, ceux qui ne parlent plus alsacien couramment. Par ailleurs, il faut bien dire, qu’au milieu de l’immense offre télévisuelle actuelle sur l’ensemble des supports, les émissions en langues régionales restent très rares et encouragent donc ceux qui ont envie d’entendre ces langues à les regarder.

 

  1. GsunTheim a longtemps été une émission itinérante, réalisée et tournée dans des lieux insolites ou institutionnels. Pourquoi avez-vous fait le choix d’une émission en plateau à l’automne 2020 ?

Nous sortions du confinement et dans un premier temps, il devenait impossible de tourner en extérieur en raison des contraintes sanitaires. J’ai donc choisi de rester en studio et de nous installer à l’Auditorium, un studio exceptionnel par son histoire et ses dimensions. C’est le plus grand studio télé, hors Paris, toutes régions confondues. J’y ai beaucoup travaillé en radio et télé par le passé, et je l’avais retrouvé quelques mois avant le confinement pour une émission avec Michel Deutsch, consacrée à nos enregistrements En Quête d’Alsace que nous avons entrepris depuis 2019 pour le Conseil culturel d’Alsace.

Notre installation à l’Auditorium a provoqué des changements dans la structure même de l’émission. Hervé a préféré se consacrer exclusivement à son émission quotidienne puis celles du we. J’ai donc changé les rubriques. J’ai redistribué Nadine Zadi dans une séquence Minute Blanche que j’écris pour elle sous la forme d’un sms des téléspectateurs, imaginaire et loufoque. Jean-Philippe Pierre a repris l’écriture de la rubrique Cactus initiée par Hervé. La leçon d’alsacien de mademoiselle Mamsell et le sketch avec Schleumayer restent inchangés. J’ai aussi repris une séquence poésie que j’avais initiée dans la Matinale, que j’ai produite de 2017 à 2020. Hélène Schwaller a donc rejoint mon équipe pour ce petit moment consacré à nos trésors de poésie dialectale et j’en suis très heureux. Restait la question du décor. Je souhaitais d’une part qu’on voit à l’image, l’étendue du studio mais qu’y figure tout de même un élément particulier, et, comme j’ai toujours soutenu les artistes plasticiens à chaque fois que j’ai pu, j’ai demandé à des artistes de nous prêter une œuvre à mettre en valeur.

Tout a commencé avec Saint Georges terrassant le dragon de Paso puis j’ai exposé La danseuse et la jeune mariée de Thierry Delorme, suivies par un Monolithe de Dorota Bednarek. Ensuite, nous avons eu tour à tour Monsieur Wildmann et Homtoro de Marc Felten, et plus récemment La déesse Isis -Venus de Robert Combas. Enfin, actuellement, Ich bedenke mich de Jean Claus. Ces œuvres sont évidemment très différentes et résolument inscrites dans notre époque. Il m’importe depuis toujours que notre langue alsacienne s’inscrive comme ces œuvres dans notre époque et dans cette exigence artistique.

 

  1. 500 émissions et autant d’invité.e.s et de mise sous les feux des projecteurs, pouvez-vous partager avec nous, 3 souvenirs exceptionnels ?

Bien sûr, nous avons eu l’avantage de tourner dans certains lieux exceptionnels, rares, et interdits au grand public. J’évoquerai brièvement Jet Aviation sur le tarmac de Bâle Mulhouse, l’Atelier Bugatti à Molsheim ou le Palais du Gouverneur à Strasbourg. Mais, quelle que soit la beauté, l’originalité des lieux, ce sont les rencontres qui ont l’avantage pour moi. Tous mes invités ont été importants, puisque je les ai tous choisis, ayant une liberté totale en termes de contenu éditorial, mais puisqu’il faut n’en retenir que trois, je citerai Louis Schittly, Sylvie Reff et Tomi Ungerer. J’ai fait deux émissions avec Louis à plus d’une dizaine d’année d’écart, trois émissions avec Sylvie qui a ainsi émaillé la série et une seule avec Tomi.

La première émission avec Louis a été consacrée à ses années de “médecin sans frontières“, à l’occasion de la sortie de son livre : L’homme qui voulait voir la guerre de près. Nous étions installés en son jardin près de sa chapelle orthodoxe au printemps 2011, dans une lumière exceptionnellement douce et dans une ambiance paisible et sereine aux antipodes des propos qui nous occupaient. La première émission avec Sylvie Reff a été tournée dans un jardin privé dans le Ried, et nous avons évoqué différents sujets de livres qu’elle avait écrits. A la fin de l’entretien, je l’ai lancée sur Hildegarde von Bingen et l’évocation cette moniale bénédictine du XIe siècle, nous aura permis de relier l’Alsace d’aujourd’hui à cette grande figure de la mystique rhénane, une manière de tirer un fil rouge à travers les époques et replacer notre région dans ce terreau culturel que l’on oublie trop souvent aujourd’hui.

Enfin, l’émission avec Tomi Ungerer avait été fragilisée par son état de santé. Je lui ai proposé, la veille, de reporter, mais il a insisté pour tenir son engagement malgré une terrible migraine. Il portait des lunettes très opaques et nous avons réduit la lumière au minimum. Il voulait absolument faire GsunTheim parce que j’avais tourné avec lui en 2002, un film documentaire Tomi Ungerer Vivre d’images, 2 x 52’ qui racontait toute sa vie et surtout son œuvre. C’est le doc le plus long et le plus complet tourné avec lui et il a toujours prétendu que c’était le meilleur depuis celui de Percy Adlon. C’est pourquoi il voulait absolument assurer ce GsunTheim qui aura été mon dernier tournage avec lui. Je conclus d’ailleurs GsunTheim la 500e avec un extrait de chacun de ces trois invités.

 

  1. La saison 2024-2025 débutera dans 3 mois, est-ce que GsunTheim sera bien sur la grille de France 3 Alsace ? Il y aura-t-il des nouveautés ?

Oui, GsunTheim sera bien présent et nous avons déjà enregistré quatre émissions. Quant aux nouveautés, je vous laisse découvrir le moment venu. Mais, je rappelle que j’ai l’habitude de proposer des changements en cours de saison…

 

  1. Christian Hahn, vous avez plusieurs casquettes [producteur, animateur, réalisateur, comédien, auteur, chanteur, metteur en scène] quels sont vos projets artistiques pour 2024 ?

Je viens de terminer avec Patrick Chevalier, l’écriture d’une pièce “Hier, demain“ pour trois personnages que nous répétons actuellement avec Lucas Bléger et que nous allons créer à Tuchan dans le Sud-Ouest, avant de la tourner (nous l’espérons) en Alsace, la saison prochaine. Ce sont trois baby-boomers, amis de longue date, qui se retrouvent après 50 ans, dans une grotte qui abritait leurs jeux d’enfants. Ils ont passé l’âge des faux espoirs et celui des utopies. Ils sont revenus de tout. Ils sont en panne de tout. Mais ne renoncent à rien. Alors, tout y passe et sans concessions, les hommes, les femmes, les LGBTQIA+, le wokisme, le capitalisme, et tous les ismes du XXe siècle, mai 68, tout comme la Divine Providence, l’Intelligence artificielle, les faux semblants et les vraies colères, les petites révoltes et les grandes déclarations, bref, tous les travers de cette génération définitivement insouciante, qui veut bien croire à l’amour et à toujours, qui est continuellement à la recherche du temps des cerises, et pour laquelle, l’amitié se conjuguera résolument avec la poésie…

Par ailleurs, je travaille, avec Michel Deutsch et pour le Conseil culturel d’Alsace, sur les enregistrements En Quête d’Alsace, que nous allons clore prochainement. Avant de les transmettre aux Archives et à la BNU, nous réfléchissons à une manière de les mettre en valeur pour le grand public au travers d’une exposition numérique aux multiples entrées. Le projet est en préparation.

Enfin, je continue d’écrire en alsacien et en français.

Propos recueillis par Anka Wessang

500e de GsunTheim : Christian Hahn passe le flambeau à Robin Leon pour une émission exceptionnelle de 52 minutes, dimanche 23 juin à 8.45 sur France 3 Alsace.

> REPLAYS DE GSUNTHEIM SUR LE SITE DE FRANCE TV

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BIO INTÉGRALE …ET IMPRESSIONNANTE !

Christian Hahn est producteur, animateur, réalisateur, comédien, auteur, chanteur, metteur en scène. Président du Conseil culturel d’Alsace, et Président du Centre de création rhénan.

• Natif de Strasbourg, il a vécu d’abord à Schiltigheim puis a grandi à Soultz-Sous-Forêts, où il a commencé le théâtre à 15 ans (Germain Muller est même venu assister en personne, à une représentation, et a essayé de le débaucher). Mais Christian Hahn attendra sa majorité pour débuter sa carrière télévisuelle en Alsace à l’ORTF. Toujours avec Germain Muller, ravi de l’intégrer enfin dans sa troupe, pour le tournage de sa pièce de théâtre emblématique Enfin…Redde m’r devun.

• Il est ensuite engagé pour l’émission radio mensuelle Hoerspiele. Dans la foulée, il travaille sur les deux antennes radios de l’époque, Alsace 1 comme animateur en français et Alsace 2 (France bleu Elsass) en alsacien, français et allemand où il intervient aussi comme comédien pour lire des textes de littérature et de poésie dans les trois langues en usages.

• Il débute en tant qu’animateur puis producteur sur France 3 Alsace en 1979  – Wer màcht mit (1979-1980) – A la Bonne heure (1988-89) – Teledisch (1990 à 1999) – Tempo (1993 à 1999) – Sowieso et Place de Bordeaux (1999/2000) – Tea Theim (2000 à 2005) – Soirée des Germains en coproduction avec la Ville de Strasbourg avec L’OPS et 30 artistes alsaciens. Une évocation de Germain Muller. – Show Theim (2005/2006) – Babbelfladde (2006/2008) et enfin GsunTheim depuis 2008.

• Pour France 3 National :
Les Estivales de 1991 à 1996 – Producteur-animateur
Les dicos d’Or 2002 à 2005 – Présentation en région
Les Victoires de la Musique 2006 – Présentation Back stage
Prix Franco-Allemand du Journalisme 2009 – Présentation bilingue
Téléthon 2010 – Présentation sur France 2 et France 3

• Il a aussi réalisé un documentaire (2 x 52′) « Tomi Ungerer, vivre d’images et assuré les captations de divers spectacles pour la télé.

• Il a été comédien pour de nombreuses pièces radiophoniques pour diverses stations allemandes NDR – WDR – SWR. Et Radios Suisses alémaniques à Bâle et à Zurich et modérateur pour la  SWF Baden Baden pour diverses émissions entre 1978 et 1983. Ainsi que présentateur du Sonntagskonzert pour la ZDF en 1987, 1991 et 1992.

• Son parcours de comédien dans diverses compagnies théâtrales et productions télévisuelles : France 3 – ZDF – SWR :
Cabaret De Barabli de Germain Muller de 1980 à 1988
Best of Barabli 1994
La Revue Scoute de 1988 à 2000
L’Alsace sans culottes 1989
Die Vögel Aristophane 1991 mise en scène Gian Gianotti à Chur Suisse
Uf em Bal de Dreikaus-Hahn-Haas au Scala Strasbourg
La Nef des Fous au TAPS Scala Strasbourg

• Ecriture et mise en scène
Chicanos NY en coécriture avec Daniel Heitz à la Choucrouterie.
VIZAVI sur la base de sketchs de Karl Valentin à la Choucrouterie.
Divers Duos avec Patricia Weller alias Marlyse Riegenstiehl.
Café Mit ! pour Roland Kieffer et Michel Pierrat
Mademoiselle MAMSELL pour Cathy Bernecker
Dans les couloirs du Monde pour Luc Schillinger et Frédéric Solunto
Noire ! pour Nadine Zadi
Un Songe d’une Nuit d’Eté sous un Barabli
Stoskopf, une prise de conscience alsacienne avec Tobias Kempf

• Mise en scène
Brandenburger Tor de Daniel Heitz
DU – Marlyse Riegenstiehl
Mamsell Maire de Michel Stourm et Roger Siffer
De Dorfdoddel pour Roland Kieffer
Madame Sans Gêne – Huguette Dreikaus
Les Oubliés de l’Histoire de Serge Marzolff
Mamebubbel de et avec Simone Morgenthaler
Dreck – Saleté de Robert Schneider
Mon colocataire est violoncelliste pour Joe Krenker et Huguette Dreikaus
Novecento le Pianiste de Alessandro Barrico
No man square de Pierre Zeidler
De Zopf de Sylvie Reff

• Adaptations de textes en alsaciens
Divers textes de Karl Valentin
L’Arlésienne d’Alphonse Daudet
La nuit juste avant les forêts de Bernard Marie Koltes
Dreck – Saleté de Robert Schneider
D’Vöjel vum Aristop’hahn librement adapté d’après Les Oiseaux d’Aristophane

 

 

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