La théorie de la destruction créatrice, vous connaissez ?

Elaborée pendant la première moitié du vingtième siècle par l’économiste autrichien Joseph Aloys Schumpeter, elle confère à l’innovation un rôle moteur dans l’enchaînement des cycles économiques. Une activité sera toujours remplacée par une autre, plus innovante. Pas de panique pour les emplois.

L’avènement de la voiture électrique constitue, partiellement, une innovation. La promotion à marche forcée dont elle a fait l’objet aboutit à une transformation radicale de cette branche de l’industrie. Avec 100.000 emplois dans le Grand Est, la filière régionale représente un quart de l’automobile française.

 

L’émergence des voitures électrique et hybrides rechargeables (28 % des ventes en France en septembre 2024) entraîne des destructions dans la filière. Les 600 salariés de Dumarey Powertrain, à Strasbourg, en font le constat amer. Ils fabriquaient des boîtes de vitesses automatiques. Dans une voiture électrique, il n’y en a plus besoin.

Leur patron, l’entrepreneur belge Guido Dumarey, a déploré comme eux qu’une décision politique européenne ait renversé la table. Le législateur a interdit la vente de voitures thermiques neuves après 2035. Sans se soucier assez des conséquences sociales et macro-économiques.

A Strasbourg, la sentence est tombée vendredi 4 octobre. 248 salariés vont perdre leur emploi d’ici au 24 janvier 2025. « Pour nous, c’est la soupe à la grimace », déplore Julien Laurent, secrétaire (CFDT) du comité social et économique (CSE) de Dumarey. Pessimistes, le syndicats craignent la fermeture définitive de cette usine, ex-General Motors, qui fut l’un des fleurons de l’industrie à Strasbourg.

Les emplois détruits chez Dumarey ne seront pas remplacés. Le Grand Est vante son attractivité économique et sa dynamique de l’emploi. Mais les usines promises en Moselle, avec HoloSolis à Hambach ou créées dans l’Aube, chez Guernica à Troyes, ne raffolent pas des compétences des reclassés de l’automobile. Et l’économie sociale de proximité, promue à Strasbourg, n’a pas besoin des ingénieurs de l’ex-GM.

La théorie de la destruction créatrice ne fonctionne plus.

Olivier Mirguet
Journaliste Correspondant Grand Est Europe
La Tribune
omirguet@latribune.fr

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