L’accès à la culture et aux œuvres d’art passe par des lieux ouverts au plus grand nombre, selon des modalités d’accès qui s’accordent aux contraintes internes de l’institution au sens large, et, simultanément, aux usages des visiteurs : touristes, artistes, mécènes ou locaux.
Favorable depuis toujours à la culture humaniste, Strasbourg rayonne grâce à son patrimoine et ses musées. Ses labels en témoignent : patrimoine de l’Unesco pour La Petite France, la Neustadt, et Capitale mondiale du livre depuis juillet.
Cependant, le coup de théâtre de cette fin d’été, qui fit découvrir le projet de fermeture des musées un jour supplémentaire par semaine, provoqua des réactions vigoureuses, à la mesure de la surprise quant à la méthode utilisée et au discours peu lisible qui accompagnait cette décision.
La mobilisation qui n’a cessé de croitre résulte d’une absence de concertation. Sur le fond, les musées ouvriront de manière alternée, et les visiteurs, d’où qu’ils soient, trouveront matière à s’extasier. Cependant l’écosystème local, non associé aux réflexions, a généré un débat devenu national, très politique, qui positionne Strasbourg aux côtés des villes à la sensibilité verte et frileuse en matière de culture, à l’heure de l’affaiblissement des moyens de la puissance publique en période d’inflation, de crise énergétique et sociale après la pandémie.
Ces préoccupations budgétaires ont porté les élus à trancher dans les ressources humaines, déjà fragilisées sous la mandature précédente, et indispensables aux ouvertures des musées. Mais plus que les objectifs poursuivis, assez flous, la méthode interroge. En amont aurait pu être questionné l’impact des mesures sur l’attractivité de la ville pour les touristes et les entreprises (pourvoyeuses de cadres, de consommateurs, de mécénat, de visiteurs). Mais aussi sur les acteurs culturels qui maillent le territoire. Ceux-ci redoutent aujourd’hui une politique culturelle autoritaire et unilatérale.
On aurait pu imaginer des scénarios alternatifs, élaborés notamment par les équipes de la culture et qui auraient croisé avec d’autres départements de la collectivité, et en lien avec les partenaires culturels. Comme le pointait la Ministre de la culture sur France Culture, le 27 septembre, d’autres mesures d’économie d’énergie pouvaient être envisagées qui ne concernent pas l’accès à la culture.
Quel a été l’objectif financier visé par ces mesures ? Quelle stratégie a été définie, qui répond à quels objectifs, qui implique qui, et selon quelles modalités ? La question de l’évaluation, mise en avant par la collectivité, ne pourra valider les choix effectués qu’en fonction d’objectifs prédéfinis. Ceux-ci n’ayant pas été clairement formulés en amont, le doute demeure sur la pertinence de cette future évaluation.
Le processus de décision sur un sujet sensible mérite un calendrier partagé et des temps de communication adaptés. Des décisions sans débat ne peuvent qu’engendrer des critiques au lieu de susciter mobilisation et élan collectif. Les meilleurs ambassadeurs des décisions prises auraient pu être ses pires critiques, s’ils avaient été associés dès le départ à la recherche de solutions. La mise en commun des informations et des questionnements permet souvent d’assurer le succès d’un projet. Et une communication fondée sur la co-construction et la transversalité aurait motivé les équipes et les partenaires, et permis de valoriser la politique muséale et culturelle de Strasbourg d’une manière inédite.